2017 : une année record des grandes évasions en RD Congo

Rarement un pays n’a enregistré, en temps de paix, autant d’évasions massives en l’espace de quelques mois comme cela a été le cas en RD Congo au cours de cette année qui s’achève.

Le mercredi 17 mai 2017, alors que la capitale congolaise se préparait à commémorer le 20èmeanniversaire de la « libération » du pays par l’Alliance des forces démocratiques de libération (AFDL) conduite par Laurent-Désiré Kabila le 17 mai 1997, le Centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa (CPRK) plus connu sous l’appellation de prison centrale de Makala, était le théâtre de la plus grande évasion des prisonniers de toute l’histoire de la RD Congo.

On apprendra, au départ, que ces sont des soldats de la secte politico-religieuse ‘’Bundi dia Mayala’’ (BDM), les fameux ‘’Makesa’’ qui ont attaqué la plus grande maison d’arrêt du pays pour libérer leur leader, le député national Zacharie Badiengesa, alias Ne Munda Nsemi, qui y était détenu pour plusieurs motifs dont l’outrage au chef de l’Etat.

A leur départ, les ‘’Makesa’’ laissaient sur le sol de nombreux cadavres, des bureaux détruits et des centaines de véhicules calcinés. Surtout, Makala s’est vidé d’au moins la moitié de ses quelque huit mille (8.000) pensionnaires, reconnaitra, plus tard, confus, le ministre de la Justice et garde des sceaux, Alexis Thambwe Mwamba.

Des milliers d’évadés parmi lesquels des criminels notoires que les services de police et de sécurité peinent, depuis lors, à remettre en taule et dont la présence dans la nature accentue la psychose sur la recrudescence de l’insécurité dans la ville de Kinshasa.

On saura, longtemps après, que l’attaque contre la prison de Makala n’était pas le fait des adeptes de la secte politico-religieuse de « Bundu dia Mayala » mais plutôt de la branche kinoise de la fameuse milice « Kamwina Nsapu » qui sévissait dans le Kasaï, au centre du pays.

Trente-six de ces assaillants âgés de 25 à 45 ans, dont trois femmes, comparaissent depuis le vendredi 24 novembre devant le Tribunal militaire de garnison de la Gombe siégeant en matière répressive au premier degré, dans le procès « ministère public contre les membres du mouvement terroriste Kamwina Nsapu/branche de Kinshasa ».

Alors que l’émotion était encore vive à la suite de cette évasion aussi spectaculaire que meurtrière à Makala, on apprenait dans la foulée une nouvelle évasion dans la bourgade de Kasangulu, située à une quarantaine de  kilomètres de la capitale mais administrativement reliée à la province du Kongo Central, qui s’est vidée, le jeudi 18 mai, de tous ses pensionnaires.

Comme une tâche d’huile, des évasions ont alors été signalées un peu partout à travers le pays.

Notamment à Kikwit, dans la province du Kwilu, Sud-Ouest du pays, où trois condamnés à mort ont réussi à s’évader du cachot militaire du camp Colonel Ebeya.

Par la suite, le samedi 10 juin, il y a eu deux attaques du Parquet de grande instance de Matete et du bureau de la police du district de Mont-Amba à Kinshasa, par une centaine d’assaillants venus libérer des détenus.

Effectivement, 17 détenus se sont enfuis, dont 14 au niveau du cachot de la police et 3 au Parquet de grande instance de Matete. Les assaillants, aujourd’hui identifiés comme membres de la branche kinoise de « Kamwina Nsapu » s’étaient cependant heurtés à la résistance de la police qui les a repoussés au Parquet de grande instance de Matete. Une policière est morte pendant les échanges de tirs et un assaillant a également succombé à ses blessures.

Dans leur fuite, ces assaillants ont mis le feu aux bâtiments et fait calciner 11 véhicules avant d’emporter 4 motos.

Plus inquiétante encore était l’évasion, le dimanche 11 juin, de 935 des 965 détenus de la prison centrale de Kangbayi de Beni, au Nord-Kivu, qui avait été attaquée à l’arme lourde, laissant sur les carreaux onze morts.

Parmi ces évadés, se trouveraient de sinistres rebelles ougandais des ADF qui sèment horreur et désolation parmi les populations congolaises de Beni et ses environs.

Le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, a tôt fait, le jour même de cette évasion spectaculaire, de décréter un couvre-feu à Beni et dans la ville voisine de Butembo, sans que cela ne rassure vraiment la population.

Le vendredi 28 juillet, trois personnes sont mortes à la suite d’une évasion d’une vingtaine de détenus à la prison centrale de Bukavu, dans la province du Sud-Kivu à l’Est de la RD Congo.

Le dimanche 3 septembre, cent dix-neuf (119) détenus se sont évadés de la prison de Kabinda, dans la province du Lomami, au centre du pays. Au moment de l’évasion, cette même prison comptait 124 détenus dont 92 prévenus et 32 condamnés.

Le dimanche 24 septembre, 34 prisonniers dont 27 condamnés se sont évadés de la prison de Mwenga, dans la même province du Sud-Kivu.

Cette chronologie des évasions qui est loin d’être exhaustive, situe la RDC en tête du hit-parade des pays à fort pourcentage d’évasions de prisonniers.

Mais surtout, ces évasions en cascade soulèvent d’inquiétantes interrogations au sein de l’opinion. Notamment sur les conditions de vie dans les prisons congolaises qui sont souvent surpeuplées et qualifiées de « mouroirs » aussi bien par les ONG nationales qu’internationales.

Malheureusement, depuis ces évasions massives en cascade, on n’a pas eu l’impression que quoi que ce soit ait changé en ce qui concerne les prisons du pays.

Source APA

Pape Ismaïla CAMARA
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