Après une collecte catastrophique, une menace plane sur l’avenir des huileries, selon des acteurs du secteur

L’avenir des huileries sénégalaises est menacé au vu de la collecte ‘’catastrophique’’ de seulement 39.276 tonnes par l’ensemble des unités industrielles, sur un objectif initial de 630.000 tonnes dans le cadre de la campagne agricole 2015-2016.

Ce signal d’alarme a été lancé, hier jeudi, par le secrétaire général du Syndicat des travailleurs de la Compagnie d’exploitation des oléagineux (COPEOL), Mamadou Sonko, et le superviseur de la zone centre de Suneor, Boubacar Aw.

‘’La COPEOL, sur un objectif initial de 200. 000 tonnes, n’a pu collecter que 19.757 tonnes d’arachide d’huilerie, soit une quantité très en-deçà de son seuil de rentabilité et de profit qui est de 30.000 tonnes’’, a confié à l’APS M. Sonko.

‘’Loin de son objectif initial de collecte, l’entreprise s’est séparée, dès le 21 mars 2016, de tous ses travailleurs journaliers, des Groupements d’intérêt économique (GIE), et saisonniers au nombre d’environ 300 travailleurs pour ne laisser que 23 employés permanents pour assurer le fonctionnement de l’usine’’, a-t-il ajouté.

Lors des précédentes campagnes agricoles, l’usine réceptionnait par jour 1500 tonnes, alors que, pour la campagne 2015-2016, elle tourne pratiquement avec 20 tonnes par jour.

La Suneor et ses nombreux problèmes de management

Du côté de la Suneor, les nombreux problèmes de management qu’a connus l’entreprise en 2015 ont pratiquement plombé sa collecte. Résultat : ses unités n’ont pu collecter que 7.146 tonnes, sur un objectif initial de 300.000 tonnes, a indiqué Boubacar Aw, superviseur des opérations de production et de commercialisation de la zone centre de Sunéor.

‘’Sur cette production totale, l’usine de Lyndiane n’a produit que 3.000 tonnes, alors qu’en temps normal, elle a une capacité de trituration de 300 tonnes par jour’’, a-t-il ajouté. La présente campagne a été ‘’blanche’’ pour Suneor qui a été obligée de mettre au chômage technique pratiquement 3.000 travailleurs saisonniers, journaliers et prestataires de services, s’est-il désolé.

Selon lui, si cette situation de perte continue, ce qui est sûre, c’est qu’il y a un risque de voir partir les investisseurs et promoteurs français du groupe Castel qui ont racheté l’actif de l’ex NOVASEN, disparue à cause des campagnes agricoles difficiles pour rebâtir sur ses ruines la Copéol, et les Américains qui ont repris la West African Oil (WAO) basé à Kahone.

Selon lui, WAO, sur un objectif de 80.000 tonnes, n’a collecté que 12.692 tonnes cette année.

Pour M. Aw, ‘’le danger d’un retrait des huiliers de la filière arachide signifie que les Chinois auront le monopole du marché et risquent, à l’avenir, d’imposer aux producteurs sénégalais leurs prix’’.

‘’C’est pourquoi nous attirons l’attention de l’Etat sénégalais pour combattre cette concurrence déloyale des Chinois qui, du reste, n’ont pas de charges de fonctionnement, comme les huileries qui doivent s’acquitter de plusieurs charges (salaires personnels, facture électricité, d’eau, maintenances)’’, a expliqué M. Sonko de Copéol.

L’Etat du Sénégal interpellé

‘’En réalité, nous ne pourrons pas supporter les mêmes efforts de prix au kilogramme, en dépit de nos efforts pour aller jusqu’à 245 francs le kilogramme, alors que le prix officiel du kilogramme à l’usine est de 227 francs’’, a-t-il martelé.

Les responsables des huileries de Copéol et Sunéor ont par conséquent appelé l’Etat à la sauvegarde des huileries, en supprimant’’ le système carreau-usine’’, qui selon eux, fait des opérateurs privés stockeurs, des intermédiaires.

Ils souhaitent donc l’élimination de ces intermédiaires qui, selon eux, ‘’ne sont intéressés que par la recherche du gain’’. De fait, ils suggèrent de revenir au système des coopératives paysannes qui permettront aux huiliers de traiter directement avec les huiliers.

Ils ont invité aussi l’Etat à fixer une limite aux quotas d’exportation, faute de quoi il y aura des difficultés pour reconstituer le capital semencier. S’y ajoute que toutes les bonnes graines partiront, avec les systèmes de triage des Chinois, pour ne laisser place qu’à de mauvaises graines.

L’Etat se doit de sauvegarder de façon équitable les intérêts des producteurs et des huiliers et supprimer le système de ravitaillement ‘’carreau-usine’’, ont-ils insisté.

Selon un rapport d’évaluation périodique du Comité national interprofessionnel de l’arachide (CNIA) en date du 17 avril 2016, environ 266.720 tonnes d’arachide d’huilerie ont été déjà exportées dans le cadre de la présente campagne 2015-2016.

Source APS

Momar Diack SECK
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