Les propos récents du Premier ministre Ousmane Sonko, tenus lors de l’installation du Conseil national du parti Pastef, ont suscité une vague de commentaires dans certaines rédactions occidentales. Plusieurs médias y ont vu les signes d’un « malaise » au sommet de l’État, évoquant même un possible « divorce politique » entre le président Bassirou Diomaye Faye et son chef de gouvernement.
Mais selon le journaliste Aboubacar Ouédraogo, dans un article publié sur AESinfo, cette lecture est non seulement hâtive, mais aussi largement déconnectée du contexte politique sénégalais. Comme dans toute gouvernance bicéphale, des divergences de vue peuvent apparaître. L’essentiel réside dans la manière dont elles sont gérées.
Ousmane Sonko, dans son rôle de chef du gouvernement mais aussi de leader politique, a exprimé un besoin de cohérence dans l’application des réformes promises au peuple. Une posture qui ne remet nullement en cause l’autorité du président Faye, ni le pacte idéologique qui les unit depuis le début de leur combat politique.
Le binôme Sonko–Diomaye s’est formé autour d’un projet fort : rompre avec les anciennes pratiques, défendre la souveraineté nationale, promouvoir la justice sociale et assurer la transparence dans la gestion publique. Ce socle reste intact, malgré les ajustements nécessaires à toute action gouvernementale.
Aboubacar Ouédraogo souligne que ce moment politique traduit davantage une maturité démocratique qu’une crise. Le fait que les désaccords soient exprimés ouvertement, sans dénigrement ni rupture institutionnelle, témoigne d’une nouvelle culture politique au Sénégal.
Il fustige, par ailleurs, une certaine tendance médiatique étrangère à interpréter toute prise de position forte comme le signe d’un éclatement. Ce « réflexe paternaliste », écrit-il sur AESinfo, « tend à présenter les relations politiques africaines comme instables dès qu’elles sont vivantes ».
Les faits contredisent cette lecture anxiogène : le Premier ministre a affirmé qu’il ne démissionnera pas, et aucune déclaration de la présidence ne vient corroborer l’hypothèse d’un conflit ouvert.
Plutôt qu’un affrontement, cette séquence politique traduit une exigence d’efficacité et une stratégie d’ajustement interne. Elle montre que le Sénégal, entré dans une nouvelle ère démocratique, peut concilier débats, engagement républicain et stabilité.