Le Chant Du Loup Par Nioxor Tine

Notre pays traverse des moments très difficiles, pleins de doutes et d’incertitudes.

Est-ce pour cela, que les loups se mettent à chanter et sortent du bois, à l’occasion de la 80ième session de l’Assemblée Générale des Nations-Unies, pour déstabiliser le nouveau pouvoir pastéfien porteur d’ambitions de rupture avec le mode de gestion des précédents régimes ?

Il était pourtant clair, à la veille de la première alternance, bien avant les Assises nationales de 2008-2009, qu’une profonde refondation du système politique était devenue nécessaire, dans notre pays. Le refus du président Wade et de son successeur de faire droit à cette exigence populaire s’expliquait par leur option pour la continuité, d’autant que la survie du système néocolonial est antinomique avec une véritable démocratisation de la vie publique.

L’hyper-présidentialisme, un parlement godillot, une Justice aux ordres et le clientélisme politique sont, en effet, des ingrédients indispensables pour la plupart de nos Chefs d’Etat qui, à l’image des gouverneurs de colonies d’antan, continuent d’administrer nos pays, pour le compte de l’ancienne métropole.

C’est l’absence de résolution de contradictions venues à maturité, de comblement du hiatus entre aspirations démocratiques du peuple et le style tyrannique de gestion du président Macky Sall, qui est à l’origine de son règne très controversé qui a cristallisé et exacerbé les antagonismes entre acteurs politiques, qui perdurent encore, hélas !

Le clivage net entre deux camps persiste, entre les forces patriotiques et anti-impérialistes se réclamant de concepts tels que la souveraineté nationale, la justice sociale, la lutte contre la corruption et celles d’inertie, reposant sur les couches parasitaires que sont les bourgeoisies bureaucratique et compradore.

C’est dire donc, que l’accession du PASTEF et de ses alliés au pouvoir est censée marquer une nouvelle ère politique dans notre pays.

De fait, la problématique du parachèvement de nos souverainetés semble avoir été prise à bras-le-corps (retrait des troupes françaises, volonté proclamée de s’émanciper de la dépendance monétaire, diversification des partenariats, renégociation de contrats).

La reddition des comptes et le traitement judiciaire des évènements 2021-2024 semblent repartir du bon pied, depuis le dernier remaniement ministériel du 6 septembre 2025, en droite ligne de l’allocution mémorable d’Ousmane Sonko, deux mois auparavant, le 10 juillet, lors de la mise en place du conseil national du PASTEF.

Il est cependant permis de douter que la problématique de l’amélioration de la gouvernance sociopolitique puisse être épuisée par les lois votées, à la fin du mois d’Août dernier et portant sur la lutte contre la corruption (OFNAC), sur la déclaration de patrimoine et sur le statut et la protection des lanceurs d’alerte. Des lois, qui font d’ailleurs penser aux Assises de la Justice, tenues deux mois après l’accession du PASTEF au pouvoir, en fin mai 2024 et dont l’essentiel des conclusions n’est toujours pas matérialisé.

Quant aux questions institutionnelles, qui devraient constituer l’épine dorsale du processus de transformation systémique, elles semblent souffrir de la quasi-omerta organisée autour des Assises nationales, malgré le fait que le candidat Diomaye avait souscrit au pacte de bonne gouvernance démocratique, à la veille de la dernière élection présidentielle.

Les conclusions des Assises Nationales et les recommandations de la CNRI devraient pourtant être garantes de la durabilité voire de la pérennisation du changement systémique tant convoité.

D’ailleurs, l’absence de vision claire et de ligne directrice des changements à opérer expliquent la grande confusion, qui règne au niveau de l’espace politique avec son lot d’invectives, d’insultes, de menaces tous stigmates d’une approche subjective et crypto-personnelle de la confrontation politique.

Au sein même du camp de la majorité, on observe une cacophonie entre approches ou lignes idéologiques différentes, qui, pourrait, à la longue, nuire à sa crédibilité. C’est pour cette raison qu’il est urgent, de tenir un Congrès du PASTEF, en vue de trouver des consensus forts au sein de cette galaxie, regroupant plusieurs sensibilités et de doter cette formation politique d’une ligne politique claire et identifiée.

Par ailleurs, PASTEF doit s’élever au-dessus du débat de caniveaux, dans lequel, l’opposition ne cesse de vouloir l’entrainer, en privilégiant comme cible de sa communication politique, les masses fondamentales de notre pays, qui doivent être éclairées sur les vrais enjeux de la transition politique en cours.

Pour y arriver, il faut faire en sorte, que le débat politique ne soit plus circonscrit dans les réseaux sociaux, qui à eux seuls, ne sauraient constituer des baromètres fiables pour mesurer l’état de l’opinion, un indicateur que toute gouvernance démocratique et responsable doit prendre en considération.

Le nouveau pouvoir PASTEF a hérité d’une situation désastreuse aussi bien relativement à une gestion financière calamiteuse, avec une dette colossale et partiellement dissimulée, qu’au plan des mœurs politiques avec de longues traditions de clientélisme, de transhumance et de corruption politique.

Ces tares propres au système politique en vigueur dans notre pays remontent à la période coloniale et sont d’autant plus difficiles à éradiquer qu’elles sont largement répandues au sein de l’appareil d’Etat et dans la société dans sa globalité, n’épargnant pas certains secteurs du nouveau pouvoir.

Hormis le principe de tolérance zéro pour les crimes de sang et les délits financiers graves, il faudrait user, en direction de la classe politique, d’une approche « transpartisane », plus centrée sur la pédagogie que sur la répression, surtout dans la sphère des droits et libertés, où certaines pratiques d’embastillement systématique et/ou de détention provisoire démesurément prolongée n’ont plus lieu d’être.

La nouvelle feuille de route pour sortir notre pays de l’ornière devrait être déclinée dans une nouvelle charte fondamentale, matérialisant la naissance d’une nouvelle République, à faire valider par le peuple souverain et centrée sur la refondation institutionnelle, telle que promue par les Assises nationales.

Nioxor Tine

Dieyna SENE
Up Next

Related Posts