Ignorer la presse : Un pari risqué pour tout État qui aspire à réussir Par Kémo Daffé journaliste

Peut-on imaginer un État avancer seul, sans sa presse, ou en la tenant volontairement à l’écart ? La question mérite d’être posée à l’heure où les relations entre pouvoirs publics et médias restent marquées par des tensions, des incompréhensions et parfois des décisions unilatérales qui affectent le secteur. Pourtant, l’histoire contemporaine et l’observation des démocraties modernes montrent qu’aucun État ne peut réussir durablement s’il ignore le rôle essentiel de sa presse.

 

Un contre-pouvoir indispensable à la transparence

 

La presse est avant tout un contre-pouvoir. Elle interroge, analyse et éclaire. En relayant les faits, en contextualisant les décisions politiques, en donnant la parole aux acteurs publics comme privés, elle permet aux citoyens de comprendre ce qui se joue dans la gestion de leur pays. L’État qui marginalise sa presse se prive d’un instrument fondamental de transparence, donc de légitimité.

 

« L’information est un bien public », rappellent souvent les journalistes. Sans ce bien, l’espace public devient opaque, laissant la place aux rumeurs, aux manipulations et à la défiance. Un gouvernement qui avance dans le brouillard médiatique finit inévitablement par perdre la confiance de sa population.

 

Un relais essentiel pour l’adhésion populaire

 

La réussite d’une politique ne dépend pas seulement de sa pertinence technique. Elle dépend surtout de sa compréhension et de son appropriation par les citoyens. Et cela passe par les médias.

 

Qu’il s’agisse de réformes institutionnelles, de programmes sociaux, de projets économiques ou d’infrastructures, l’État ne peut convaincre sans un relais médiatique crédible et dynamique. Ignorer la presse, c’est fragiliser la capacité de l’État à expliquer, rassurer et mobiliser. C’est laisser une place béante aux interprétations erronées, aux oppositions infondées et à la désinformation.

 

L’expérience montre que les pays qui avancent le plus sont ceux qui instaurent une relation constructive, parfois exigeante, avec leurs médias.

 

Un partenaire du développement national

 

La presse n’est pas seulement un observateur : elle est un acteur du développement. Dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la protection des données, de l’environnement ou de l’économie, les médias jouent un rôle de sensibilisation déterminant. Ils valorisent les initiatives, accompagnent les changements, encouragent l’innovation et renforcent la participation citoyenne.

 

Écarter les médias, c’est affaiblir un moteur essentiel du progrès. Dans un contexte de transformations rapides numériques, institutionnelles, économiques la collaboration entre l’État et la presse devient un impératif stratégique.

 

Une relation à refonder pour une gouvernance moderne

 

Pour réussir, l’État a besoin d’une presse forte, professionnelle et indépendante. De son côté, la presse a besoin d’un État qui respecte la liberté d’informer, protège les journalistes et crée un environnement favorable au travail médiatique.

 

Refonder cette relation, c’est reconnaître que la réussite d’un pays repose sur trois piliers indissociables : la transparence, la participation citoyenne et l’information de qualité. Aucun de ces piliers ne peut se tenir si l’État choisit d’ignorer sa presse.

 

En définitive, un État peut difficilement avancer seul. Il a besoin de sa presse comme d’un miroir, d’un relais et parfois d’un aiguillon. C’est dans cette interaction que se construit une gouvernance efficace, démocratique et durable.

 

Dieyna SENE
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