DPG du premier ministre Ousmane Sonko : « Une Tardive Déclaration de Politique Générale ! », selon le PIT

Déclaration Du Secrétariat Du Comité Central du PIT :  Le Secrétariat du PIT-Sénégal a suivi avec attention, le 27 décembre 2024, la tardive Déclaration de Politique Générale (DPG) du Premier Ministre Ousmane Sonko. En effet, ce n’est qu’après de longs mois d’attente et de tergiversations volontaires, révélateurs d’une volonté farouche de se créer sa propre tribune, que le Premier Ministre se décide de se jeter à l’eau, réussissant ainsi à éviter cet exercice devant la mandature précédente.

Pour autant, à l’écoute des propos du Premier Ministre et des débats qui ont suivi, de nombreuses interrogations demeurent, dont certaines préoccupantes. En effet, les propos et le programme énoncés diffèrent pour la plupart des actes posés par le Gouvernement depuis sa prise de fonction. À titre d’exemple, le peu de cas fait de l’Assemblée nationale, avec cette loi de finance rectificative présentée à moins d’une semaine de la fin de l’exercice budgétaire !

Sur le plan économique, les Sénégalaises et Sénégalais endurent les décisions difficilement compréhensibles, ainsi que les propos déconnectés du Premier Ministre, qui incriminent le régime précédent et la haute administration des Finances et du Budget pour avoir falsifié les chiffres de la dette et des finances publiques. Cela a altéré la confiance des partenaires techniques et financiers qui attendent toujours le rapport définitif de la Cour des Comptes sur l’état des finances publiques, les chiffres dits « réels » et les recommandations.

Pour l’heure, la note du Sénégal a été dégradée, avec les conséquences que cela implique en termes d’accessibilité aux prêts et du coût des financements engagés par l’État. Concrètement, ce sont les compatriotes sénégalais, le secteur privé et le secteur informel qui pâtissent directement du manque de responsabilité et de vision de nos actuels dirigeants, adeptes des bonbons au bel emballage mais au goût particulièrement amer.

En son fond, la tardive DPG du Premier Ministre Ousmane Sonko n’est en réalité qu’une profession de foi survenant après les élections, reprenant de nombreuses idées du référentiel «Sénégal 2050», dont des pans entiers étaient déjà présents dans le « Plan Sénégal Émergent ». Au point de devoir rappeler à son énonciateur que l’exercice du pouvoir requiert tout autre chose que de discourir sans fin en totale incohérence avec les actes posés et au mépris de la souffrance pourtant réelle de ses compatriotes !

Autrement, comment décemment parler d’« indépendance de la justice » et de protection « des interférences avec la justice », de volonté d’éviter « la chasse aux sorcières » et la « vengeance », lorsque -entre autres – Moustapha Diakhate, homme politique ayant exprimé son opinion sur les résultats des élections croupit en prison au moment de la DPG ? Le PIT-Sénégal réitère son soutien indéfectible à Moustapha Diakhate victime d’une injustice manifeste, alors que, durant et avant les dernières élections législatives, d’autres acteurs politiques ont tenu des propos bien plus graves, avec pour conséquence des violences physiques et matérielles, sans jamais avoir été convoqués par un quelconque procureur.

Et que dire de la brutale éviction de Barthélémy Toye Dias, pourtant Maire élu de Dakar, tout en étant opposant au régime précédent, naguère ami et grand allié de Monsieur Ousmane Sonko et du PASTEF durant les dernières élections municipales ? N’est-il pas manifeste que les règles de droit s’appliquent à certains suivant les rapports qu’ils ont avec le nouveau pouvoir ?

En ce qui concerne la loi d’amnistie de mars 2024, le PIT-Sénégal avait déjà clairement annoncé, lors du dernier Dialogue national des 26 et 27 février 2024, convoqué par le Président Macky Sall, sa ferme opposition à son adoption. À nos yeux, aucune violence physique, morale ou politique ne doit être amnistiée et mise sous silence dans l’intérêt de desseins politiques d’un cynisme sans nom, surtout lorsque cela se termine par des morts, des blessés et des traumatismes dont il sera difficile de se remettre.

Pour rappel, notre prise de position avait pu gêner certains alliés au sein de Benno Bokk Yakaar, mais le PIT-Sénégal demeure convaincu qu’une justice impartiale, indépendante est essentielle pour éviter que notre société ne sombre dans la barbarie. Une loi d’amnistie ne doit pas être une prime à l’impunité comme ce fut le cas avec la loi Ezzan dans l’affaire de l’assassinat de Maître Babacar Sèye en 1993, ainsi que dans celle de l’agression du leader politique Talla Sylla en 2003.

Mais si l’Assemblée nationale décidait d’abroger la loi d’amnistie, qui n’aurait jamais dû être adoptée, des questions difficiles se poseraient. Par exemple, de nombreux présumés acteurs ou instigateurs des violences de 2021 à 2024, de tous bords, ont été libérés dont l’actuel Premier Ministre, lui-même. Quel sort leur réserverait-on ? Faudra-t-il rappeler que l’actuel Premier Ministre avait refusé de se présenter à la convocation d’un juge ?

Notre Nation n’a jamais connu l’abrogation d’une loi d’amnistie juridiquement complexe car touchant aux principes de l’État de droit, à la sécurité juridique et à la stabilité des actes législatifs.

Ne risquerions-nous pas d’ouvrir la boite de Pandore ?

Si le PIT-Sénégal est pour la reprise des enquêtes et des auditions liées aux violences, afin que chaque Sénégalaise et chaque Sénégalais soient clairement informés des responsabilités de chacun, il ne milite pas pour la réouverture du cycle de tensions ayant conduit notre pays au bord du précipice. Il y va de la responsabilité de tous, des acteurs politiques en tout premier lieu.

Or, sur les 103 pages du document lu par le Premier Ministre Ousmane SONKO, à peine une demi-page a été consacrée au « plan politique », pour évoquer brièvement des points de principe comme « la bonne gouvernance », « les conditions de participation aux élections, l’organisation de ces dernières » et « le statut du chef de l’opposition ». Ce qui est bien insuffisant et trahit une grande méprise quant aux jalons posés bien avant l’avènement de PASTEF et de ses dirigeants.

Le système politique sénégalais est certes perfectible, mais il a atteint un certain seuil après de longues luttes de la gauche sénégalaise et d’autres forces qui se sont sacrifiées pour le Sénégal.

Peut-être doit-on relever que Monsieur Ousmane Sonko dirige un parti politique, le PASTEF, depuis environ 10 ans, sans avoir jamais organisé le moindre congrès pourtant indispensable à une organisation politique démocratique. Ici encore, la césure est nette entre ce qui est dit et ce qui est fait…

Une note positive tout de même pour cette tardive DPG : les derniers mots du Président de l’Assemblée nationale, Malick Ndiaye, concluant le débat et rappelant que l’Assemblée, à travers ses élus, a le devoir d’être un « partenaire du Gouvernement, en relayant les doléances des populations et en contribuant activement à l’élaboration de lois pertinentes », tout en restant « une vigie, gardienne de l’intérêt général », dépassant « les clivages et les débats partisans ».

Certains semblent avoir pris la mesure du poids des responsabilités inhérentes à leur fonction et à leur haute responsabilité. Peut-être en inspireront-ils d’autres ?

Fait à Dakar, le 29 décembre 2024

Le Secrétariat du Parti de l’Indépendance et du Travail

Dieyna SENE
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