Le Forum national sur le livre et la lecture, célébré la semaine dernière en présence du Président Bassirou Diomaye Faye, a rappelé combien la lecture est au cœur de la citoyenneté et de l’émancipation. Mais, il y a une vérité qu’il faut oser dire : sans lieux pour lire, se documenter et accéder au savoir, ces célébrations resteront des gestes symboliques, sans impact réel sur le pays.
Pendant trop longtemps, les jeunes Sénégalais en quête de lecture se sont réfugiés dans les centres culturels étrangers. Ces espaces ont, certes, permis l’accès aux livres, mais, au prix d’une diffusion d’imaginaires, de modèles et d’idéologies qui ne reflétaient pas toujours nos réalités, ni nos valeurs.
Aujourd’hui, continuer à dépendre de ces relais culturels extérieurs, c’est renoncer à notre souveraineté intellectuelle.
Nous avons les moyens, mais, où est la volonté ?
Le Sénégal n’a pas besoin d’attendre pour agir. Dakar dispose déjà d’infrastructures pouvant devenir des pôles du livre et de la connaissance. La Maison de la Presse, avec sa terrasse, ses salles et son sous-sol inexploité, pourrait être transformée en bibliothèque nationale moderne, espace de lecture publique ou médiathèque connectée.
Dans les régions, les centres culturels publics, les établissements scolaires et certaines grandes écoles peuvent servir de relais. Mais, tant que ces lieux restent sous-équipés, fermés au public ou réduits à des coquilles vides, la célébration du livre restera une façade.
Le vrai chantier, c’est la souveraineté culturelle
Créer des bibliothèques nationales, des médiathèques régionales et des centres de lecture de proximité n’est pas une faveur : c’est un impératif stratégique. C’est ainsi que l’on forme des citoyens ancrés dans leur culture, ouverts au monde, et capables de transmettre leur patrimoine.
Cette ambition doit s’accompagner de la numérisation et de la réhabilitation des Archives nationales, afin que notre mémoire écrite soit accessible, valorisée et protégée. Aucune nation ne peut construire son avenir en confiant sa mémoire aux autres.
Lire n’est pas un luxe, c’est une dignité
Il faut en finir avec l’idée que le livre se promeut seulement par des discours, des journées commémoratives ou des salons sporadiques. La lecture se pratique dans des lieux pensés pour cela : bibliothèques, médiathèques, salles d’archives, espaces scolaires adaptés, centres de documentation polyvalents. Sans cela, nous continuerons à parler du livre sans jamais l’habiter.
Le moment est venu de transformer les symboles en infrastructures, les intentions en politiques publiques, et les slogans en actes.
La jeunesse sénégalaise ne réclame pas des photos officielles, encore moins des discours d’intention, mais, des espaces de savoir.
C’est ainsi que l’on construit une Nation intellectuellement libre.
C’est mon avis.
Bon repos dominical.
Par Babou Biram Faye (BBF)
Journaliste-communicant
Homme de culture