David Aguele, citoyen nigérian, et le Centre pour le droit communautaire (CFCL), une ONG, ont conjointement assigné le président de la Commission de la CEDEAO et le Conseil des ministres devant la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CJCE), contestant la décision de l’organisation régionale de conserver à son service des fonctionnaires originaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger, pays qui ont renoncé à leur adhésion à la CEDEAO.
Dans la plainte n° ECW/CCJ/APP/47/25 datée du 22 septembre 2025, M. David Aguele, diplômé sans emploi résidant à Benin City, dans l’État d’Edo, et le CFCL sont les premier et deuxième demandeurs, tandis que le Conseil des ministres de la CEDEAO et le président de la Commission sont respectivement les premier et deuxième défendeurs.
Les requérants demandent à la CCJ de déterminer la légalité de la circulaire ECW/Memo/DC/2025-14/ak publiée par le Président de la Commission le 4 juillet 2025 et/ou de déterminer si la circulaire et la décision de la session extraordinaire du Conseil des ministres tenue les 22 et 23 avril 2025 à Accra, au Ghana, sont conformes aux articles 18(5), 10(3)(f) et 92 du Traité révisé de la CEDEAO de 1993, ainsi qu’aux articles 50(h), 51(1)(b)(viii) et 53(d) du Statut du personnel de la CEDEAO (révisé en 2021).
Les juntes militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont formé l’Alliance des États du Sahel (AES), suite à la suspension de leurs pays de la CEDEAO suite au coup d’État militaire contre les gouvernements de ces trois pays.
Le 16 septembre 2023, les trois dirigeants de la junte ont annoncé que leurs pays avaient quitté la CEDEAO avec effet immédiat. Cependant, conformément aux instruments régionaux pertinents, la 66e session de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO, tenue en décembre 2024, a accordé aux trois pays le délai de 12 mois stipulé pour officialiser leur retrait avant le 29 janvier 2025 ou réintégrer le giron de la CEDEAO.
La Conférence a en outre demandé au Conseil des ministres de la CEDEAO de convoquer une session extraordinaire afin de déterminer les modalités de séparation des pays de l’AES de la CEDEAO.
Après la session du Conseil, le Président de la Commission a publié la circulaire ECW/Memo/DC/2025-14/ak, suggérant que les membres du personnel des pays de l’AES de grade P5 et supérieur quittent la CEDEAO.
Dans leur action en justice, M. Aguele et le Centre de droit communautaire soutiennent que « en raison de cette circulaire, le premier défendeur a décidé unilatéralement de maintenir tous les fonctionnaires permanents de l’AES de grade inférieur à P5, sans recourir aux dispositions claires du Traité révisé de la CEDEAO et du Statut du personnel, ni même au « Ils ont agi de manière arbitraire, sans autorisation légale, conformément aux directives claires du Conseil des ministres. » Les déclarations/ordonnances sollicitées par les requérants sont les suivantes :
Une ordonnance ordonnant au premier défendeur de verser la somme de dix mille dollars américains (10 000 USD) au premier requérant pour le préjudice subi et enduré en raison des décisions.
Une déclaration selon laquelle, à compter du 29 janvier 2025, les citoyens des États membres de la CEDEAO ont perdu leur nationalité de la CEDEAO et la protection conférée par celle-ci, y compris le droit de travailler et de s’établir grâce à un passeport de citoyenneté de la CEDEAO.
Une déclaration selon laquelle la circulaire ECW/Memo/DC/2025-14/ak est illégale et, par conséquent, nulle et non avenue.
Une déclaration selon laquelle la circulaire ECW/Memo/DC/2025-14/ak constitue une violation des droits des contribuables et des jeunes chômeurs, ainsi qu’une violation de l’État de droit, que le deuxième requérant a un intérêt direct à faire respecter au sein de la Communauté.
Une déclaration Les décisions contextuelles des défendeurs, notamment la circulaire ECW/Memo/DC/2025-14/ak, violent les droits du premier requérant, dans la mesure où elles ont rendu impossible la nomination de plusieurs postes vacants au sein de la CEDEAO pour lesquels il espérait légitimement être embauché.
Toute autre ordonnance que la Cour communautaire jugera appropriée dans les circonstances de la présente affaire.
Les professeurs Amos Enabulele et Michael Agbo ont intenté la procédure au nom de M. Aguele et du Centre de droit communautaire de Benin City, qui « promeut et protège les droits des citoyens de la CEDEAO et l’État de droit au sein de la Communauté ».
La Cour communautaire n’a pas fixé de date pour l’audience, mais a accordé aux défendeurs un délai de 30 jours pour présenter leur défense, faute de quoi « … les requérants pourront y procéder et le jugement pourra être rendu en leur absence ».
Après avoir adopté une ligne dure initiale, menaçant notamment de recourir à la force militaire pour rétablir l’ordre constitutionnel au Niger, la CEDEAO a levé les sanctions imposées aux trois pays de l’AES, mais a tenté en vain, par le dialogue et la diplomatie, de les ramener au sein du bloc régional.
Le budget annuel de la CEDEAO est financé par le prélèvement communautaire versé par ses États membres.
Lorsque la Mauritanie a quitté la CEDEAO en 2000, tous ses ressortissants employés par la CEDEAO ont également quitté le pays, conformément aux instruments régionaux pertinents.
Selon des sources juridiques et diplomatiques, à moins que le dossier de l’AES ne soit résolu administrativement, le procès Aguele/CfCL pourrait ouvrir la voie à d’autres contestations judiciaires concernant la décision controversée de maintenir le personnel de l’AES au sein de la CEDEAO, rémunéré à partir des contributions financières des États non membres de l’AES.
Parallèlement, le sort de certaines agences et institutions de la CEDEAO dans les pays de l’AES est également en attente d’une décision finale.
Correspondance particulière
Journaliste récemment primé meilleure plume de l’intégration,
Paul Ejime est un spécialiste des médias et de la communication
Analyste des affaires internationales.


