Ce «je-ne-sais-quoi » qui envoûte… Par Khady Gadiaga

La beauté sidère et fascine, parfois même celui ou celle qui la possède se fige alors dans son image, mais dans son autosuffisance, elle manque d’un composant essentiel : l’humour, le recul, la prise de risque. Et finit par donner l’envie irrépressible d’aller voir ailleurs.

Par contre ce célèbre vers de Baudelaire dit tout du charme : « Le rire joue en ton visage comme un vent frais dans un ciel clair ».

Ce fameux «je-ne-sais-quoi » porte le nom d’un sortilège: sa mobilité subtile, son rayonnement, l’effet d’étourdissement qu’il provoque à son insu. Ainsi que le recours à des métaphores pour le décrire, puisqu’il est, par essence, indéfinissable.

Son étymologie latine, carmen, signifie formule magique, enchantement. Et ce n’est pas étonnant que Mérimée, (puis Bizet) ait ainsi nommé son héroïne insaisissable, à la séduction irrésistible …

Le charme est plus fort que la beauté. Fait de contrastes et de facettes changeantes, on se dit que l’on n’a pas fini de l’explorer.

Son corollaire serait le charisme qui a la même étymologie que le charme, l’incarne surtout dans sa version incantatoire. Inévitable, puisqu’imperceptible comme le frémissement de l’aile d’un papillon, le charme est une arme absolue aux effets parfois redoutables.

À compétence, à intelligence, à culture et éducation égales, celui ou celle qui a un charme très subtil gagnera sur celui ou celle qui n’en a pas.

Il entre dans une pièce, on ne voit que lui. Il parle, et tout le monde se tait.  C’est donc souvent à travers la parole qu’il opère : grain de voix, sens de la formule, capacité d’écoute et formulation limpide, en adéquation avec les expressions non-verbales (gestes, attitudes).

Le charme, ce peut être aussi la drôlerie, la cocasserie, l’ironie, quand on sent qu’elles sont une façon de maquiller le jeu. Le charme, c’est tel homme politique, insupportable quand il est péremptoire et plein de charme quand tout à coup on le sent pris au dépourvu. Le charme, c’est la fêlure qui va provoquer une réaction de tendresse humaine de la part de celui qui la perçoit.

Empathiques, présents au monde, respectueux, les individus charismatiques contrôlent leurs affects tout en restant vibrants et sensibles.

Pour toutes ces raisons combinées, ils inspirent la confiance qui construit les grands leaders. Pour le meilleur ou pour le pire ?

 

Et que dire donc du charme féminin ?  C’est d’abord un halo que diffusent celles qui l’irradient et dans lequel, nous qui les regardons, vivons des moments exquis. Remarquons que tout devient merveilleux dans la brume. C’est l’incertitude et l’insaisissable qui nous charment et qui n’ont pas grand-chose à voir avec la séduction, travail de stratégie flagrant.

Le charme, lui, n’obéit à aucune stratégie érotique. Il ne sert à rien. Il est gratuit, ce qui le rend sans prix. C’est un cadeau permanent et calme.

Chez la femme, le charme a une telle féminité, tellement intelligente que le charme qu’elle irradie se met aussitôt à pétiller sans provoquer. Quand on sent que la personnalité d’une femme tient à ça et qu’on arrive à mettre cette lumière en évidence, c’est fantastique. Infiniment plus beau que la beauté elle-même. On y dénote une forme d’authenticité. C’est l’élégance d’une pensée, la douceur d’une attention, une présence qui laisse une empreinte sans que l’on sache exactement pourquoi.

Le charme  d’une femme, c’est savoir créer une atmosphère autour de soi, inviter l’autre à un instant suspendu, une parenthèse de douceur et de surprise, une forme d’envoûtement.

 

D’ailleurs, on dit de certaines fatalités féminines qu’elles ont un regard à damner un saint.

J’ai toujours pensé que le regard était plutôt vecteur de rédemption qui aurait pu originellement redessiner le cours du monde…

 

Imaginez seulement Adam vivant captif en des chaînes divines ; Eve écoutant le chant menu des sources fines, le sourire du monde habitant ses beaux yeux…

Le Tentateur lui-même presque charmé en avait oublié son art et sa victime, et son cœur un moment se reposa du crime. Il répétait tout bas, et le front dans ses mains : « Si cette rose du Paradis ne pouvait qu’à moi appartenir »…

Ah ! Si dans ce moment la Vierge eût pu l’entendre, si la céleste main qu’elle eût osé lui tendre l’eût saisi repentant…

 

C’est dire que dans le regard d’une femme peut se jouer le destin d’un monde…

 

K.G 21 avril 2025

 

Mamadou Nancy Fall
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