Appel à la sérénité. Par Souley Wade

Le pays s’agite. Les passions montent, les nerfs se tendent. Le pouvoir veut démontrer sa force en annonçant un grand meeting de mobilisation populaire de ses militants et sympathisants. Comme pour donner une réponse aux remous perçus, au sein du sommet de l’État, et à la léthargie économique ambiante, sur fond de négociations décisives avec le FMI.

 

L’opposition, elle, tente de se remobiliser à l’aune d’un début de désespérance perceptible dans les masses, frustrées par la lenteur des réformes et les promesses non encore tenues.

 

Sur le plan judiciaire, le processus de reddition des comptes se poursuit, mais il est de plus en plus perçu, souvent à tort, parfois à raison, comme un instrument de règlement de comptes.

La « justice des vainqueurs » semble en marche, ou du moins, l’impression s’en installe.

 

Dans le même temps, les arrestations de journalistes s’enchaînent, les mots se durcissent, les positions se figent.

 

À mesure que le ton monte, la sérénité s’éloigne, pourtant, c’est d’elle que dépend la survie même de notre démocratie.

 

La sérénité n’est pas la passivité. Elle n’est pas non plus l’indifférence, ni le renoncement. C’est une posture lucide, un équilibre qui permet de comprendre avant de juger, d’écouter avant de réagir, de décider sans écraser.

 

Or, depuis quelque temps, le Sénégal semble s’être installé dans une fébrilité permanente : celle de gouvernants qui confondent parti et État, fermeté et nervosité, et d’une opinion publique qui réagit plus qu’elle ne réfléchit.

Tout se passe comme si la tension était devenue le mode de fonctionnement normal de la vie politique.

 

Il devient urgent de réapprendre la mesure.

Car sans sérénité, la transparence se mue en soupçon, la justice en représailles, et le débat public en vacarme. Et dans le vacarme, tout se perd : la vérité, la confiance, le lien. La sérénité, c’est une méthode de gouvernance.

 

Ce pays ne manque ni d’intelligence ni de courage. Mais il a perdu le temps long, celui du discernement. À force de vouloir tout corriger dans l’instant, on finit par oublier l’essentiel : une nation ne se bâtit pas sur la réaction, mais sur la réflexion.

 

Le Sénégal a besoin d’un nouveau souffle, d’un apaisement véritable, d’une réconciliation avec lui-même. De méthode.

 

Que revienne la sérénité, car elle est la condition première de toute nation adulte. Et c’est au leadership qu’il revient, au premier chef, de l’incarner, non pas en parlant plus fort, ou en imposant le silence, mais en réapprenant à écouter.

Dieyna SENE
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