Cinq choses à savoir sur la crise de la sécurité alimentaire au Soudan
En avril 2023, un violent conflit a éclaté entre les forces armées soudanaises et les Forces de soutien rapide (FSR) dans la capitale, Khartoum. Deux ans plus tard, la crise s’est transformée en l’une des pires urgences humanitaires au monde, provoquant la plus grande crise de déplacement de population au monde et des niveaux de faim sans précédent.
Le Soudan est confronté à une grave crise alimentaire. Près de 30,4 millions de personnes – près des deux tiers de la population, dont 15,6 millions d’enfants – ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence. Plus de la moitié de la population souffre d’insécurité alimentaire aiguë, la famine étant déjà confirmée dans plusieurs régions.
L’agriculture, principale source de nourriture et de revenus pour près de 80 % de la population, est démantelée par la violence, les déplacements et l’effondrement économique. Avec l’approche de la période de soudure et les prévisions de précipitations inférieures à la moyenne cette année, la fenêtre d’opportunité pour empêcher une nouvelle détérioration de la situation se referme rapidement.
Voici cinq choses que vous devez savoir sur la manière dont le conflit menace l’agriculture et la sécurité alimentaire au Soudan :
- L’insécurité alimentaire a atteint des niveaux historiques – et la saison des plantations de 2025 est en jeu
Le conflit continue de faire rage au Soudan, laissant plus de la moitié de la population en situation d’insécurité alimentaire aiguë. Des conditions de famine ont été confirmées dans au moins cinq zones, et des millions de personnes sont exposées à un risque immédiat de famine dans les régions du Darfour, de Khartoum et du Kordofan, touchées par le conflit. Il s’agit du niveau d’insécurité alimentaire le plus élevé jamais enregistré dans l’histoire du Soudan.
Les enfants ne sont pas épargnés. Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), plus de 3,2 millions d’enfants de moins de cinq ans devraient souffrir de malnutrition aiguë en 2025.
La FAO est prête à apporter un soutien urgent pour aider les agriculteurs à semer à temps, mais des fonds supplémentaires sont nécessaires de toute urgence pour l’achat et la distribution des semences. Sans ces fonds, de nombreux agriculteurs risquent de manquer cette période cruciale de semis, ce qui entraînerait des récoltes réduites, une aggravation de l’insécurité alimentaire et une réduction des options pour des familles déjà soumises à une pression immense. Agir dès maintenant peut encore faire la différence.
- L’accès limité demeure un défi persistant
Cette crise ne concerne pas seulement la pénurie alimentaire, mais aussi l’accès à la nourriture. Les marchés ont été pillés, les chaînes d’approvisionnement rompues et les routes rendues dangereuses. Des produits essentiels comme les semences, les engrais et le carburant sont hors de portée, et les prix ont flambé. De nombreuses familles n’ont tout simplement pas accès à ce dont elles ont besoin pour survivre.
L’accès limité continue d’empêcher l’aide vitale d’atteindre des millions de personnes, en particulier celles prises au piège dans des zones de conflit comme le Darfour et le Kordofan. Les travailleurs humanitaires eux-mêmes sont confrontés à de graves dangers. Depuis le début du conflit, plus de 110 travailleurs humanitaires ont été tués, blessés, enlevés ou sont toujours portés disparus.
Sans un accès sûr et sans entrave, la crise ne fera que s’aggraver. Il est urgent d’agir pour garantir que l’aide vitale puisse atteindre chaque recoin du pays.
- Les principales zones de production sont confrontées à de graves perturbations
Le secteur agricole soudanais est soumis à une pression croissante, le conflit en cours continuant de perturber des zones de production clés. Des agriculteurs ont été déplacés et contraints de quitter leurs terres, et l’accès aux intrants de production et à des terres agricoles sûres devient chaque jour plus difficile. Ces perturbations mettent non seulement en péril les moyens de subsistance des communautés rurales, mais constituent également une grave menace pour la production agricole et la sécurité alimentaire du pays.
- Les interventions en matière d’élevage sont gravement sous-financées
Les systèmes d’élevage subissent également une pression considérable. La destruction des chaînes de production de vaccins et d’approvisionnement vétérinaire a exposé des millions d’animaux aux maladies. Pour de nombreux ménages ruraux, l’élevage est plus qu’une source de revenus : il est un pilier de la nutrition, de la résilience et de la sécurité alimentaire. La dégradation de la santé animale s’accompagne d’une dégradation des perspectives pour des communautés entières.
En 2024, la FAO a vacciné 2,8 millions d’animaux, distribué 8 300 chèvres et livré 850 tonnes d’aliments et de pierres à lécher aux familles d’éleveurs. Parallèlement, elle a distribué environ 5 300 tonnes de semences certifiées à 2,8 millions de personnes, leur permettant ainsi de planter et de reconstruire leurs moyens de subsistance.
Ces interventions ont directement soutenu la production alimentaire et la création de revenus, mais elles n’ont fait qu’effleurer les besoins. Sans un soutien accru, davantage de familles perdront leurs récoltes, leurs animaux et leur capacité à se nourrir.
- La crise risque d’être oubliée
Alors que d’autres crises font la une des journaux, la famine qui s’abat sur le Soudan continue d’être largement ignorée. En 2024, seuls 37 % des fonds demandés ont été reçus. Aujourd’hui, en 2025, avec la réduction des budgets humanitaires, les perspectives restent profondément incertaines. Ce niveau de soutien est dangereusement insuffisant dans un pays où une personne sur deux souffre d’insécurité alimentaire aiguë. Derrière chaque chiffre se cache une personne confrontée à des choix impossibles pour survivre.
Alors que la famine est confirmée dans au moins cinq régions et que des millions d’autres personnes sont menacées, il faut faire beaucoup plus pour garantir que le monde ne détourne pas le regard et que les familles ne soient pas laissées seules face à cette crise.
L’aide agricole d’urgence est l’une des solutions les plus rentables et les plus efficaces pour répondre aux crises. Elle permet aux familles de cultiver leur propre nourriture et de préserver leurs moyens de subsistance. Associées à une aide alimentaire ou financière, ces interventions renforcent la disponibilité alimentaire, améliorent la nutrition et contribuent à une plus grande stabilité, tout en réduisant les coûts humanitaires globaux. Plus important encore, elles répondent aux demandes des communautés touchées : subvenir à leurs besoins, rester chez elles lorsque cela est possible et prendre en charge leur propre relèvement.
Pour les populations rurales, les moyens de subsistance constituent le meilleur rempart contre la faim et la malnutrition. Dans un contexte de besoins croissants et de financements limités, investir dans l’agriculture est non seulement efficace, mais essentiel.
En 2025, la FAO prévoit d’apporter une aide urgente à 14,2 millions de personnes à travers le Soudan. L’Organisation recherche d’urgence 156,7 millions de dollars pour renforcer la production alimentaire, protéger le bétail et aider le secteur agricole à se redresser avant que le conflit ne détruise les acquis de plusieurs générations.
Source FAO