Histoire de la FAO, source de Motivation : Un essaim d’opportunités

En Türkiye, de jeunes apiculteurs font rimer ruches avec emplois et perspectives d’avenir.

Dans la province de Düzce, à quelque 200 kilomètres au nord-ouest d’Ankara (Türkiye), Züleyha Ceylan, 22 ans, emmène chaque matin son petit tracteur bleu sur les routes sinueuses des villages, le long des champs de noisetiers, jusqu’à une parcelle de ruches multicolores.

Elle enfile sa combinaison d’apiculture jaune canari et une paire de gants roses, puis craque une allumette. Une fois les abeilles calmées par les volutes de fumée qui s’échappent de son enfumoir étamé, elle soulève le couvercle de la première ruche. À l’intérieur, la colonie bourdonne de vie. La jeune femme examine les cadres pour déterminer les niveaux de production de miel, vérifie la présence de la reine et cherche d’éventuels signes de maladie – autant de tâches qui requièrent de la patience, de l’habileté et une observation minutieuse. Certaines inspections ne durent que quelques minutes, quand d’autres s’étendent sur une demi-heure ou plus – chaque ruche vivant à son propre rythme.

«Depuis mon enfance, j’aime être à l’extérieur, avec les animaux et la nature», explique-t-elle en s’arrêtant pour écouter le bourdonnement des abeilles. «Je ne me voyais pas coincée dans un bureau en ville. Le son des abeilles agit sur moi comme une thérapie. Leur bourdonnement m’apaise et me donne de l’énergie pour la journée.»

Lorsque Züleyha s’est lancée dans l’apiculture l’année dernière, certains membres de sa communauté ont émis des doutes sur son choix. «Ils me disaient que c’était un travail d’homme», se souvient-elle en souriant. «C’est comme si on disait qu’une femme ne peut pas conduire une voiture! Aujourd’hui, ces mêmes personnes viennent me demander des conseils pour leurs abeilles.»

Même si personne, dans sa famille, n’a jamais pratiqué l’apiculture, ses proches ont toujours cru en son choix. Bien qu’allergique aux abeilles, son père l’a aidée à acheter ses premières colonies et son matériel. «Mes parents m’ont dit: “Fais ce qui te plaît” et m’ont soutenue tout le long de l’aventure», poursuit-elle. «C’est ce qui m’a donné le courage d’aller de l’avant.»

Une activité d’avenir

Bien que la province de Düzce abonde en terres agricoles et en forêts, plus de 32 pour cent des jeunes âgés de 15 à 24 ans sont au chômage. Nombreux sont ceux qui choisissent de tenter leur chance en ville pour y trouver un emploi, abandonnant les vieilles exploitations et laissant derrière eux des villages vides.

L’apiculture offre une autre voie: c’est une activité qui nécessite peu de terres, des investissements relativement modestes, avec une souplesse dans les horaires de travail. En outre, la demande de miel et de produits à base de miel reste forte. À Düzce, l’abeille locale Yığılca, réputée pour sa résistance et sa capacité à produire un miel de grande qualité, laisse espérer des perspectives encore plus fructueuses pour le secteur.

Pour Züleyha, qui a choisi de rester dans son village, les abeilles sont synonymes de moyens de subsistance et d’indépendance.

«Cette année, j’ai produit une centaine de kilos de miel», indique-t-elle. «Ce n’est pas énorme, mais tout s’est vendu très vite, grâce à mes amis et aux réseaux sociaux. Les gens me font confiance, car ils voient comment je m’occupe de mes abeilles. Je partage même des vidéos en ligne pour expliquer mes produits.»

Les rêves de Züleyha ne s’arrêtent pas à la simple production de pots de miel. «Je souhaite agrandir mon rucher et commencer à produire de la gelée royale, du pain d’abeille et de la propolis – c’est-à-dire tous les produits que sont capables de fabriquer les abeilles», explique‑t‑elle. «Un jour, j’aimerais créer ma propre entreprise et fournir des emplois à d’autres personnes.»

Apprentissage, connexion et croissance

La réussite de Züleyha repose sur un mélange de passion et d’aides ciblées. En août 2025, elle a participé, avec neuf autres apiculteurs enthousiastes et bénéficiaires de projet, à un programme de formation animé par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et la Direction provinciale de l’agriculture et des forêts.

«Avant, admet-elle, je ne savais pas comment vendre mes produits ni comment traiter efficacement les maladies des abeilles. Grâce à la formation, j’ai appris à gérer les colonies, à prévenir les maladies et à mieux vendre mon miel. Ces connaissances m’ont donné confiance en moi.»

La formation lui a apporté plus que de simples compétences. «J’ai rencontré des personnes expérimentées – c’était très enrichissant. Je n’en suis qu’au début de mon aventure, mais j’espère devenir rapidement une meilleure apicultrice.»

Une terre faite pour les abeilles

La province de Düzce elle-même est une terre d’élection pour l’apiculture. Près de 60 pour cent de son territoire sont couverts de forêts où alternent tilleuls embaumants et châtaigneraies. La région abrite environ 60 000 ruches et quelque 800 apiculteurs. Elle a même obtenu une indication géographique pour son miel de châtaignier sombre et onctueux, et accueille un programme universitaire consacré à l’apiculture.

«Ici, une part importante de la production agricole provient de l’apiculture», explique Ezra Uzun, Directrice de la Direction provinciale de l’agriculture et des forêts. «Par ailleurs, Düzce protège la souche de reine Yığılca dans une zone spéciale isolée. Cette mesure, conjuguée à la richesse de nos forêts, nous confère des avantages uniques.»

Toutefois, la crise climatique a entraîné une modification des régimes pluviométriques et des cycles saisonniers, qui affecte la santé des abeilles et la production de miel. De plus, le déclin de la population rurale fait peser une menace sur la durabilité de l’agriculture.

Pour Ezra Uzun, la solution se trouve dans la collaboration: «Avec la FAO, nous travaillons sur des projets qui améliorent la production et l’image de marque, mais aussi encouragent les jeunes à rester dans les campagnes. Nous avons pour ambition de transmettre le patrimoine agricole aux nouvelles générations, en l’associant aux connaissances et à la technologie.»

Ayşegül Selışık, représentante adjointe de la FAO en Türkiye, fait écho à ces propos: «Düzce recèle d’énormes avantages naturels pour l’apiculture. Or, bon nombre de jeunes et de femmes se heurtent à des obstacles qui les empêchent de prendre pied dans ce secteur. En leur offrant des formations, un appui technique et la possibilité d’acquérir des compétences entrepreneuriales, nous les aidons à transformer ces atouts en moyens de subsistance durables. Le but n’est pas seulement de renforcer l’apiculture aujourd’hui, mais aussi de faire en sorte que les générations futures puissent mener une vie prospère ici.»

Un avenir rayonnant

Au milieu de ses ruches, Züleyha envisage avec optimisme les débouchés offerts par l’apiculture. «Grâce aux formations dispensées par la FAO et au soutien de notre communauté, j’entrevois un avenir ici – pas seulement pour moi, mais aussi pour la prochaine génération d’apiculteurs de Düzce.»

«N’ayez pas peur de vous lancer», conseille-t-elle aux autres jeunes. «Avec les bonnes informations et un soutien adéquat, vous pouvez réussir. Et grâce aux technologies modernes, vous pourrez vendre vos produits non seulement ici, mais aussi à l’international.»

L’hiver, quand ses abeilles se reposent, elle peint des paysages, des animaux et ses petits compagnons bourdonnants qui lui manquent. «Désormais, ma vie est calée sur le rythme des abeilles. En peignant, je reste en contact avec elles, même pendant ces mois de repos», conclut‑elle en souriant.

Chaque année, le 16 octobre (Journée mondiale de l’alimentation) est l’occasion de célébrer des héros de l’alimentation dans le monde entier. Des agriculteurs et des pêcheurs aux innovateurs et aux chefs, les héros de l’alimentation dirigent des initiatives locales et mondiales qui visent à mettre en place des systèmes agroalimentaires plus durables et plus résilients. Mais nous pouvons tous être des héros de l’alimentation: en respectant la nourriture, en arrêtant de gaspiller et en réduisant notre consommation de produits non essentiels. Nos actions déterminent notre avenir. Travaillons ensemble à l’améliorer.

L’histoire originale et les photos associées sont disponibles sur: https://www.fao.org/newsroom/story/buzz-worthy-opportunities/fr

Pape Ismaïla CAMARA
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