Nous nous réjouissons de la nouvelle posture du gouvernement sénégalais, incarnée par le ministre de l’Économie, lors BIG 2025 organisé par Bpifrance, qui marque un tournant vers plus de pragmatisme.
Le débat sur le franc CFA est trop souvent pollué par des passions idéologiques. Pourtant, les faits sont clairs : le CFA assure stabilité et confiance. La preuve : même les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), malgré leurs relations exécrables avec la France, restent dans la zone CFA et continuent de lever des fonds sur le marché financier régional de l’UEMOA. Si la France avait une mainmise impérialiste sur le CFA, ces pays ne pourraient pas mobiliser ces financements librement, sans entraves.
Le Sénégal lui-même a fini par tirer les leçons de l’expérience. Le gouvernement actuel du PASTEF, autrefois très hostile au CFA, s’est rendu compte au contact des réalités économiques que sa perception reposait essentiellement sur des idées reçues. L’expérience pratique a mis à nu les risques d’une sortie précipitée qui aurait été une véritable catastrophe monétaire et financière.
Par ailleurs, lors du BIG 2025 organisé par Bpifrance, le ministre Abdourahmane Sarr a affirmé que l’UEMOA est un cadre monétaire et de change crédible, garanti par une banque centrale indépendante. Il a également rappelé que la stabilité de ce cadre repose sur la discipline macroéconomique, la transparence et l’attractivité, et que le Sénégal doit se positionner dans les dynamiques mondiales d’innovation.
Il n’est pas inutile de rappeler que des pays qui n’ont jamais été colonisés par la France – la Guinée-Bissau et la Guinée équatoriale – ont volontairement choisi d’adhérer au CFA. Cela prouve que ce système dépasse largement le simple lien historique : il repose avant tout sur sa crédibilité et son efficacité.
La vraie question n’est donc pas de casser ce qui marche, mais de réformer.
Les pistes sont connues :
- Changer le nom, pour tourner la page symbolique.
- Introduire plus de flexibilité, par exemple en arrimant la monnaie non plus seulement à l’euro mais à un panier de devises.
- Élargir l’UEMOA, en y intégrant les pays voisins, car le projet de l’ECO tarde à se concrétiser.
En vérité, ce qui bloque nos économies, ce ne sont ni la monnaie ni la France, mais des problèmes internes persistants : corruption, mauvaise gouvernance, extraversion économique, marchés étroits qui limitent l’industrialisation, ainsi que l’instabilité sociale et politique. C’est sur ces fronts qu’il faut une révolution.
Pr Amath Ndiaye
FASEG-UCAD