Accusée de servir les intérêts du pouvoir en place après la publication d’un audit accablant sur la gestion budgétaire sous Macky Sall, la Cour des comptes sénégalaise, par la voix du magistrat Aliou Niane, affirme son indépendance et défend la légalité de sa démarche.
Sous le feu des critiques après la publication de son rapport sur les finances publiques couvrant la période 2019-2024, la Cour des comptes du Sénégal riposte. Accusée d’avoir agi sur commande du nouveau pouvoir en place, l’institution de contrôle a opposé une défense ferme de son indépendance, portée par la voix du magistrat Aliou Niane, président de la chambre de discipline financière.
« Nous ne dépendons d’aucun pouvoir. Nous tenons à notre indépendance comme à la prunelle de nos yeux », a martelé le magistrat le 5 avril, balayant les accusations d’instrumentalisation du rapport. Il a même évoqué les tensions historiques avec le pouvoir exécutif, affirmant qu’« un président de la République a failli dissoudre la Cour des comptes ».
Le rapport, publié le 12 février, a mis en lumière de graves irrégularités dans la gestion budgétaire du Sénégal sous Macky Sall : transferts opaques, écarts dans la dette publique, absence de traçabilité de 2 562 milliards de F CFA de dépenses, ou encore omission de plus de 260 milliards F CFA de créances douanières. Des opposants au nouveau régime ont dénoncé une opération de communication orchestrée par le Premier ministre Ousmane Sonko pour décrédibiliser ses prédécesseurs.
« Le rapport sur la situation des finances publiques est une exigence du Code de transparence dans la gestion des finances publiques de l’UEMOA », a tenu à rappeler Aliou Niane, soulignant le caractère légal et non circonstanciel du document. Il a précisé que la Cour avait respecté toutes les étapes procédurales prévues par la loi organique de 2012, en insistant :
« Il faut un minimum de trois mois pour faire l’audit, un mois pour les conclusions du parquet et un mois pour le contradictoire. »
Face aux accusations de non-respect des droits de défense, le magistrat a été formel : « Toutes les procédures de la Cour sont écrites et contradictoires. »
Il a rejeté l’idée que l’audit viserait des personnalités en particulier, en réaffirmant que l’objectif était de dresser un état général des finances publiques.
Sur la polémique autour de l’absence de signature visible sur le document diffusé, Alioune Niane a tranché : « Nous ne pouvons pas faire un rapport qui n’est pas signé. »
Il a expliqué qu’il s’agissait d’un usage courant, conforme à la pratique d’autres institutions de même rang : « C’est la même chose à la Cour des comptes en France. »
De son côté, le Premier ministre Ousmane Sonko a accusé l’ancien régime d’avoir « menti au pays et à nos partenaires en falsifiant les chiffres publics », en écho au rapport de la Cour et aux propos d’Eddy Gemayel, chef de mission du FMI, qui a confirmé une sous-estimation délibérée du stock de la dette.
La Cour, par la voix du magistrat Aliou Niane, se veut une « sentinelle des finances publiques », et appelle à renforcer les mécanismes de contrôle, la transparence budgétaire et le respect des standards de l’UEMOA.
S apanews.net